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Microfinance : en attendant la réforme, la croissance bridée par le risque

Microfinance : en attendant la réforme, la croissance bridée par le risque

 

- Le secteur compte aujourd’hui plus d’1 million de clients et 200.000 nouveaux accédants au microcrédit par an.

- Le coût du risque du secteur avoisine 2,8% pour l’année 2017.

- Les institutions de microfinance voient leur croissance se modérer par une sensibilité plus accrue au risque.

 

 

Les raisons objectives qui légitiment l’intérêt de se pencher sur la microfinance sont nombreuses. En dépit des avancées significatives en matière de lutte contre la pauvreté, l’exclusion et le chômage, le pays est toujours aux prises à des défis de taille en matière de disparités économiques et sociales. Dans le même temps, le microcrédit affiche une propension à promouvoir la microentreprise, tout en extirpant de la précarité une catégorie de la population aux moyens limités et qui a souvent des difficultés à trouver des produits bancaires adaptés à ses besoins.

Notons qu’en 2016, sur les 900.000 clients que comptait le secteur de la microfinance, 45% étaient des femmes. Le prêt moyen accordé par les associations de microcrédit (AMC) tournait autour de 7.000 dirhams.

Ceci dit, la question immédiate à se poser est de savoir pourquoi la réforme de la microfinance annoncée depuis des années, et censée booster l'activité qui fut fortement chahutée entre 2009 et 2011 par une hausse vertigineuse des impayés, peine à voir le jour.

Soulignons que cette réforme devrait apporter des solutions qualitatives et remédier à certains anachronismes, à l'instar du statut des institutions de microfinance (association) et du plafond de crédit limité à 50.000 dirhams.

Interrogé par nos soins, en sa qualité de Directeur général de Al Amana microfinance, Youssef Bencheqroun rassure. «Les pouvoirs publics ont décidé de tirer parti d'une étude approfondie des différentes expériences internationales de pays qui nous ont précédé dans la mise en œuvre de la réforme», confie-t-il.

«Cette étude a été présentée l'année passée et ouvre de nombreuses possibilités dans le cadre de la loi bancaire actuelle», ajoute-t-il.

Au regard de ce qui précède, différentes options sont ainsi ouvertes et les équipes de la tutelle seraient à l'ouvrage pour la proposition de la future loi, en tenant compte de l'ensemble des composantes opérationnelles, prudentielles, fiscales et sociales. Au-delà des enjeux inhérents à la réforme, il est judicieux de faire une intrusion sur l’activité en 2017, tout en examinant les perspectives de l’année en cours.

 

Une sensibilité accrue au risque

 

Au sujet du dynamisme de la microfinance, si le DG de Al Amana révèle que le secteur gère aujourd'hui un portefeuille d’1 million de clients, en enregistrant près de 200.000 nouveaux accédants au microcrédit par an, celui-ci alerte néanmoins sur le facteur risque. «Dans l'ensemble, depuis ces dernières années, les institutions de microfinance ont vu leur croissance se modérer par une sensibilité plus accrue au risque. Ce dernier est lié à l'évolution socioéconomique de nos bénéficiaires, de leur attitude vis-à-vis du crédit d'une part, et d'autre part, à la nécessité d'afficher des fondamentaux financiers satisfaisants vis-à-vis des bailleurs de fonds», concède-t-il.

Au volet de la rentabilité, les AMC ont clôturé l’exercice 2016, avec un bénéfice net de 211 MDH, en retrait de 14%, contre une progression de 10,7% en 2015. Par ailleurs, il est important de souligner que la réduction du coût du risque continue d’être une priorité pour les AMC. Ces dernières utilisent une kyrielle de mesures en amont (scoring et consultation systématique du crédit bureau), et en aval, avec une proximité vis-à-vis du client. Cela facilite la restructuration du prêt en cas d'incapacité à honorer les engagements ou à accéder au fonds de solidarité (en cas de maladie ou d'accident). D’après notre interlocuteur, le coût du risque du secteur ne devrait pas être très éloigné des 2,8% pour l’année 2017.

Par ailleurs, l’autre chiffre de nature à conforter l’importance de la microfinance au Maroc est que, si l’on tient compte des interruptions entre un prêt et son renouvellement, ce sont plus de 2,5 millions de ménages qui ont été clients du microcrédit.

A en croire les professionnels, 2017 a été marquée par le contrecoup de la sécheresse de 2016. Toujours selon eux, l’année 2018 démarre certes dans le sillage de l'exercice précédent mais la bonne nouvelle provient des pluies récentes qui sont de bon augure et laissent présager un sursaut de l’activité. ■

 


L’innovation a porté ses fruits

A la question de savoir si les AMC font suffisamment preuve d’innovation afin de répondre aux besoins des clients, certaines données inhérentes à la diversification semblent confirmer l’ingéniosité de celles-ci. En effet, le secteur compte plus de 1,8 million d'assurés et 750.000 comptes de dépôt à faible revenu (low income). A cela, s’ajoutent 3 Mds de DH pour les transferts d'argent.

Les services domestiques (recharges téléphoniques, paiement de factures, vignette, etc.) génèrent également un chiffre d’affaires conséquent. Dans le même ordre d’idées, un effort de segmentation de la clientèle a été fait dans l’optique de proposer des produits à traite ou à grâce variables en fonction de l'activité du bénéficiaire. Notons enfin qu’avec plus de 200 agences ouvertes ces dernières années et le déploiement de 120 unités mobiles dans les régions rurales enclavées, les AMC ont élargi substantiellement leur maillage territorial.


 

 

 

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