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Expert-comptable : les métiers de base menacés

Expert-comptable : les métiers de base menacés

 

90% des métiers de base des experts-comptables vont disparaître.

Des acteurs digitaux débarquent avec un businessmodel totalement disruptif.

 

Le métier d’expert-comptable n’est pas imperméable à la digitalisation qui investit quasiment tous les secteurs de l’économie nationale. Le numérique est certes une opportunité mais également un défi, voire une menace pour les professionnels qui n’en perçoivent pas encore la centralité.

Dans les autres pays, notamment les plus développés où la réglementation permet à d’autres métiers de concurrencer l’activité des experts-comptables, l’on assiste à l’émergence de plusieurs acteurs disruptifs qui proposent des offres non moins intéressantes. Il existe aujourd’hui quantité de logiciels de comptabilité permettant de récupérer la data à l’origine des écritures comptables. 

D’autres logiciels offrent également la possibilité pour l’entreprise de disposer des données afférentes à l’aspect juridique. Cette irruption de la technologie dans l'expertise-comptable, fait qu'aujourd'hui, dans la presse occidentale, on n'hésite plus à parler "d'ubérisation de la profession comptable". 

Zakaria Fahim, Managing Partner du cabinet BDO, et président de la Commission TPE-PME, GE-PME et autoentrepreneur de la CGEM, est formel : «Notre métier est en train d’être fortement chahuté par des acteurs souvent digitaux qui viennent avec un businessmodel totalement disruptif. Il nous incombe en tant que professionnels de rester devant et de nous différencier par une réelle valeur ajoutée», suggère-t-il. En d’autres termes, cette différenciation passe avant tout par le conseil et l’accompagnement de la restructuration d’entreprise.

Ahmed Hassan Chahbi, expert-comptable et trésorier général de l’Ordre des experts-comptables, abonde dans le même sens. «Notre expertise ne se limite pas seulement aux aspects financiers, elle englobe également tout ce qui est organisation, management, audit des systèmes d’information, etc.».

Outre les nouveaux acteurs digitaux, rappelons que les experts-comptables sont également concurrencés par les comptables agréés.

Une utre information révélée par le patron de BDO est autrement plus cruciale et annonciatrice de la profonde mutation en cours de l’activité des hommes des chiffres : «Il faut savoir que 90% de nos métiers de base vont disparaître au cours des années à venir», prévient-il.

L’exemple le plus édifiant provient d’Europe où pratiquement l’ensemble des opérations sont tracées, même s’il faut reconnaître qu’au Maroc, nous sommes encore loin du compte, car bon nombre d’opérations se font encore en cash.

Nos interlocuteurs restent persuadés que la révolution en marche en Europe et aux USA arrivera inexorablement au Maroc. En conséquence, les professionnels qui sont dans l’incapacité d’anticiper ces tendances lourdes, notamment la digitalisation, ne pourront pas accompagner de façon idoine leurs clients.

Sur le front de la digitalisation, Ahmed Hassan Chahbi en appelle à la restructuration et à la mise à niveau des cabinets. «Nos partenaires sont quelque part en avance par rapport à nous», concède-t-il. Conscient de ces enjeux, l’Ordre des experts-comptables a organisé une rencontre portant sur la digitalisation, qui a regroupé les acteurs-clefs (DGI, CNSS, Tribunal de commerce, etc.). Il existe un enjeu majeur de formation continue pour les experts-comptables. La tendance actuelle montre également que le métier devra s’ouvrir sur de nouvelles activités, tout en attirant de nouveaux talents évoluant dans d’autres domaines (IT, marketing, etc.).

 

Un tissu entrepreneurial propice

A quelque chose malheur est bon ! Les risques majeurs qui guettent le tissu entrepreneurial local, voire l’économie nationale, montrent une fois de plus le caractère crucial de la profession d’expert-comptable, qui visiblement, a encore de beaux jours au Maroc. Pour rappel, ces périls concernent entre autres, l’allongement des délais de paiement, la gestion de trésorerie et les risques de change.

«Nous sommes bien placés pour aider les entreprises à faire face aux risques actuels, d’autant plus que le cash est de plus en plus difficile à capter et les clients ont de plus en plus de mal à se faire payer dans les délais», assure le patron de BDO, qui rappelle l’expertise avérée des experts-comptables dans l’accompagnement de l’entreprise pour l’encaissement en amont et le paiement à temps de ses clients.

 


Tous les cabinets ont-ils leur place ?

D’aucuns allèguent que les grands cabinets d’expertise-comptable s’adjugent les marchés juteux du conseil et de l’accompagnement au Maroc. Interrogé sur la place des cabinets de petite ou moyenne taille, le trésorier général de l’Ordre rétorque : «Tous les cabinets même ceux de petite taille ont leur place sur le marché domestique car il ne faut pas perdre de vue que les PME et TPE dominent le tissu entrepreneurial local». Et d’ajouter : «Les gros cabinets accompagnent les grandes entreprises dont les besoins sont énormes. Tandis que les cabinets moins importants en taille sont suffisamment outillés pour prodiguer un conseil adapté aux besoins des TPE et PME».


 

 

Par Momar Diao

 

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