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«Le déphasage entre règles fiscales et règles de provisionnement créent une réelle distorsion chez les banques»

Entretien : «Le déphasage entre règles fiscales et règles de provisionnement créent une réelle distorsion chez les banques»

 

La note circulaire N°5/2017 publiée par la Direction générale des impôts en février 2017 a apporté des clarifications importantes en relation avec les provisions pour créances en souffrance en admettant la déductibilité fiscale. Une clarification qui ne résout pas pour autant le problème de déductibilité fiscale des créances douteuses ou pré-douteuses. Asma Charki, Tax Partner de Mazars Audit & Conseil, nous explique les dessous d’une revendication tout à fait légitime.

 

Finances News Hebdo : Le problème du redressement fiscal chez certaines banques a relancé à nouveau le débat sur l’harmonisation des dispositions fiscales avec les règles de provisionnement bancaire. D’après-vous, qu’est-ce qui légitime une telle requête ?

 

Asma Charki : Il s’agit d’une revendication tout à fait légitime et qui ne date pas d’aujourd’hui. Le déphasage entre les règles de provisionnement adoptées par les banques, en application des règles prudentielles prévues par la circulaire n°19/G/2002 relative à la classification des créances et à leur couverture par les provisions, et les dispositions fiscales relatives à la déductibilité des provisions pour créances en souffrance prévues au niveau de l’article 10-I-F-2° du Code général des impôts créent une réelle distorsion chez les banques qui ne peuvent bénéficier de la déductibilité fiscale des provisions pour créances en souffrance dotées dans le cadre de l’application stricto sensu des règles prudentielles de la Banque centrale.

Certes, la note circulaire N°5/2017 publiée par la Direction générale des impôts en février 2017 a apporté des clarifications importantes en relation avec les provisions pour créances en souffrance en admettant la déductibilité fiscale des provisions relatives aux créances «de menue importance», dont le montant ne dépasse pas 2.500 DH, et ce dans la limite de 1% du montant global des provisions brutes de l’exercice.

Or, cette tolérance ne résout par pour autant le problème de déductibilité fiscale des créances douteuses et pré-douteuses.

 


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F.N.H. : Cette déconnexion n’est pas propre aux banques, mais aussi aux compagnies d’assurances, aux sociétés de financement, et ce en matière de provisionnement des créances en souffrance. Si la DGI applique cette harmonisation, cela se traduirait par une baisse des recettes fiscales avec toutes les conséquences qui en découlent sur le Budget. Êtes-vous du même avis ?

 

A. Ch. : Effectivement, la divergence entre les dispositions fiscales et les règles de provisionnement concerne, en plus des banques et des établissements de crédit, les sociétés de financement, les compagnies d’assurances et même les sociétés délégataires de services publics; bien que ces dernières ne soient pas particulièrement concernées par les règles prudentielles de la Banque centrale.

Quant à l’impact de l’harmonisation sur les recettes fiscales, il faut souligner que même en admettant la déductibilité fiscale des provisions pour créances douteuses – sous réserve du respect de certaines conditions de forme et de fond –, leur imposition à l’IS ne serait que décalée dans le temps, soit au moment de la récupération de l’encours douteux par l’établissement du crédit ou au moment de l’annulation de la créance dans les conditions admises par la réglementation.

 

F.N.H. : Quel benchmark pouvons-nous faire avec un pays comme la France dont nous nous inspirons beaucoup en matière fiscale ?

 

A. Ch. : On peut citer, à titre d’exemple, la  déductibilité fiscale de la provision pour risques afférents aux opérations de crédit à moyen et long terme accordée en faveur des établissements de crédit et même en faveur des entreprises qui consentent des crédits à moyen terme en faveur de leurs clients.

Il s’agit d’une provision dont la dotation est plafonnée par le bénéfice comptable de l’exercice et dont le montant global ne peut excéder un pourcentage de l’encours global des crédits utilisés.

Toutefois, et de manière générale, les dispositions relevées dans les législations étrangères ne sont pas forcément transposables au niveau des textes marocains, eu égard aux spécificités économiques et règlementaires propres à chaque pays.

En effet, la réglementation fiscale marocaine n’admet pas le principe de déduction de la provision forfaitaire ou statistique. D’ailleurs, cette même disposition vient d’être abrogée par la Loi de Finances 2014. ■

 

 

Propos recueillis par S. Es-siari

 

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