Driss Guerraoui, secrétaire général du Conseil économique, social et environnemental (CESE), affirme qu’il est temps que les territoires s’imposent comme les principaux acteurs du développement en lieu et place de l’Etat central.
Les régions doivent innover et trouver le modèle fiscal le plus approprié au développement de leurs territoires. Entretien.
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Finances News Hebdo : Quelle place la régionalisation avancée peut-elle occuper au sein du nouveau modèle de développement économique du Maroc ?
Driss Guerraoui : La régionalisation avancée est au cœur du modèle de développement économique auquel aspire notre pays. Elle en est un axe principal et stratégique, et constitue l’une des plus importantes réformes de l’Etat et a été consacrée dans le cadre de la Constitution de 2011.
Construire un nouveau modèle sans prendre appui sur les 12 nouvelles régions, c’est rester à côté de l’essentiel.
Il est temps que les territoires deviennent les principaux acteurs de développement et non l’Etat central. Cette régionalisation doit se baser aussi bien sur les acteurs publics, privés que la société civile. Il s’agit d’un concept qui doit être porté par la population locale, et qui doit avoir l’aval de tous les intervenants et de tous les acteurs, avant qu’il soit porté par les élites et les institutions.
Le modèle de régionalisation adopté par le Maroc est particulier et prend en considération les spécificités locales. Chaque agent économique ou social, qu’il soit citoyen, entreprise, etc. doit bénéficier d’un traitement de proximité tout au long du processus. L’objectif est de simplifier les procédures et d’assurer le maximum d’efficacité.
F.N.H. : La réduction des inégalités régionales est-elle possible dans le cadre de ce nouveau modèle ?
D. G. : Les inégalités peuvent être productives si l’on offre les conditions de transformation des régions en créateur de richesses nouvelles et d’une dynamique de mobilité sociale et, par conséquent, des leviers de sortie de la pauvreté.
Ce n’est pas une fatalité : l’équité et la justice sociale, c’est possible ! Il faut un travail de longue haleine sur le terrain. Il s’agit de mener des analyses approfondies, jusqu’au patelin le plus reculé, pour réaliser des diagnostics plus efficients pour la réalisation de programmes d’intervention efficaces.
Par ailleurs, il faut favoriser la convergence des actions des différents départements ainsi que leur programmation, selon la spécificité de chaque territoire. Il faut investir de nouvelles pistes et initier de nouvelles approches d’aménagement du territoire en s’appuyant sur une centaine de centres émergents, sélectionnés selon des critères objectifs, autour desquels vont s’opérer des actions intégrées de mise à niveau territorial.
Une telle démarche serait de nature à favoriser la réduction des déficits qui affectent plusieurs secteurs, notamment ceux de l’éducation et de la santé, tout en assurant une meilleure rentabilisation économique et sociale de l’investissement public.
F.N.H. : Quel rôle peut jouer la fiscalité locale dans ce projet ?
D. G. : La fiscalité locale est déterminante. C’est un axe important pour la construction d’une politique de solidarité active au sein des collectivités territoriales.
Elle a un rôle important pour séduire les investisseurs et encourager les entreprises dans leurs activités.
Les régions doivent innover pour trouver le modèle fiscal le plus approprié afin d’assurer un développement harmonieux et intégré de leurs territoires. Il s’agit de trouver un moyen pour financer l’activité économique et aussi la solidarité.
Pour ce qui est de la délimitation des régions, avec leurs foyers de développement et leurs pôles de croissance, il est important que les différents types de régions (administratives, historiques, écologiques, économiques) soient superposés et homogènes pour les besoins du développement.
Les transferts de l’Etat central constituent le tiers des ressources des collectivités.
La mobilisation des ressources fiscales locales dépend des facteurs socioéconomiques et démographiques et pas seulement du système de décentralisation.
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Propos recueillis par C. Jaidani