Zone de libre-échange maghrébine : L'économique prend le dessus

Zone de libre-échange maghrébine : L'économique prend le dessus

Kouider Lahoual

Alors que l’Union du Maghreb arabe semble être l’otage du politique, la zone maghrébine de libre-échange, elle, semble bien avancer. L’économique réussira-t-il là où le politique a échoué ? Détails avec l’expert Kouider Lahoual, du département économique et financier de l’UMA. 

Finances News Hebdo : A l’heure où les pays se regroupent en communautés économiques pour accroître leur croissance et créer de l’emploi pour les jeunes, le Maghreb, lui, semble à l’arrêt. Du moins, c’est ce qui est perceptible. Pourtant, des choses se font mais est-ce suffisant face à certains blocages que vit l’Union du Maghreb arabe ? 

Kouider Lahoual : Comme vous le savez, les Chefs d’Etat maghrébins ont adapté depuis 1991, à Rass Lanouf en Libye, les principes fondamentaux d’une intégration économique, en l’occurrence la Stratégie maghrébine pour un développement. Laquelle consiste à mettre en place un marché commun maghrébin en quatre étapes. D’abord, une zone de libre-échange, suivie d’une union douanière. Ensuite, un marché commun, et enfin une union monétaire. Cette déclaration commune a été renforcée par la signature de plusieurs conventions, notamment en matière d’investissement dans la perspective de créer un climat favorable aux hommes d’affaires, à l’investissement et à l’intégration économique. On peut également citer la convention maghrébine de la non-double imposition, celle pour l’encouragement de l’investissement et la création en 2013 du Conseil maghrébin de la douane, qui regroupe les Directeurs généraux des administrations de douane maghrébines. Il y a eu également le projet maghrébin d’accord de libre-échange paraphé en 2010 par les cinq pays qui constituent l’Union du Maghreb arabe (UMA). 

Depuis, ce projet prévoit l’adoption de trois protocoles qui sont partie intégrante de cet accord, à savoir le règlement de différends, la valeur de douane et les règles d’origine. 

Le protocole de règlement de différends a été finalisé en 2012, la valeur en Douane en 2014, et les experts sont en train de finaliser le protocole sur les règles d’origine pour 2015. 

A l’actif de cette dynamique maghrébine, je citerai les grandes décisions des ministres du Commerce de la région en décembre 2014, pour renforcer l’intégration maghrébine dans le prolongement africain, notamment par la création d’une grande zone de l’libre-échange continentale.

Aussi, l’UMA avec les experts et l’assistance de la Commission économique pour l’Afrique, ont élaboré un plan d’action maghrébin dont le cadre de l’Initiative BIAT qui vise à renforcer le commerce intra-africain, entre les cinq pays et le reste de l’Afrique. Ce plan d’action se ventille en sept chapitres fondamentaux, à savoir la politique commerciale, la facilité douanière, les infrastructures liées au commerce, les TIC et autres secteurs; donc d’un point de vue général, tous les ingrédients qui peuvent favoriser une intégration économique sont réunis. 

F.N.H. : On dit souvent que l’économique réussit là où le politique échoue. Cependant, quel rôle peut jouer alors le secteur privé dans l’intégration économique maghrébine ? 

K. L. : Afin de donner la possibilité au secteur privé de jouer pleinement son rôle dans l’intégration économique de la région maghrébine, les pays de l’UMA ont créé en 2007 l’Union maghrébine des employeurs, qui regroupe les patronats des cinq pays de l’Union. Cette entité a déjà tenu trois forums, dont le dernier à Marrakech en février 2014, et qui s’était soldé par l’adoption par le secteur privé de l’Initiative maghrébine pour le commerce et l’investissement. Cette initiative comporte deux principales parties : la première est relative à la mise en place d’une structure forte, capable d’accompagner les hommes d’affaires dans cet élan d’intégration ; et la deuxième partie concerne un plan d’actions maghrébin qui détermine les aspects ou les secteurs prioritaires vers une intégration économique.

Cette année 2015 a connu la concrétisation de cette initiative, et je pense que la clé de son succès est la communication entre les communautés d’affaires des différents pays pour les rapprocher et se faire connaître mutuellement. Cela permettra d’identifier les potentialités et les opportunités d’affaires dans chaque pays.

F.N.H. : Il est prévu que l’Initiative BIAT, qui vise à renforcer le commerce intra-africain entre les cinq pays et le reste de l’Afrique, aboutisse en 2017. Ce deadline sera-t-il respecté à votre avis ? 

K. L. : C’est une date avancée par les Chefs d’Etat et de gouvernement africains, tel que stipulé dans le plan d’Abuja. Mais la négociation commerciale est une chose difficile, il se peut qu’il y ait un retard. En effet, il y a plusieurs communautés économiques africaines régionales qui n’ont pas encore atteint un degré avancé de fluidité des échanges entre elles, en exonération des barrières tarifaires et non-tarifaires. Il y a tout un travail qui doit se faire au sein de ces communautés. 

Propos recueillis par I. Bouhrara 

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