Sécheresse : Réaction limitée du gouvernement

Sécheresse : Réaction limitée du gouvernement

vachesLes mesures prises restent insuffisantes pour venir en aide aux fellahs les plus vulnérables, surtout dans les régions où le déficit hydrique est supérieur à 60%. La situation est assez satisfaisante dans les périmètres irrigués, mais le taux de remplissage des barrages recule à 62% contre 73% une année auparavant.

C’est une année agricole compromise. Plusieurs professionnels partagent ce constat. Les officiels, pour leur part, essaient de relativiser ou de garder le silence en attendant d'avoir plus de visibilité. Le discours du gouvernement est toujours le même : «il n’est pas encore trop tard pour que la situation se redresse». Les dernières pluies ont donné certes de l'espoir, mais leur volume est nettement insuffisant pour résorber le déficit. Les pluies tant espérées pour les mois à venir en vue de sauver la saison ne peuvent que limiter les dégâts et avoir un effet plutôt bénéfique sur les cultures printanières qui, dans l’ensemble, ne représentent que 20% des récoltes. Cette situation nous rappelle celle de l’année 2012 qui a connu le même sort. Le gouvernement n’avait pris les mesures nécessaires que tardivement et dans quelques régions seulement. Il a lancé un plan anti-sécheresse de plus de 1,5 milliard de DH. Les fonds alloués étaient débloqués pour financer l’alimentation en eau pour l’abreuvage du cheptel dans les zones les plus impactées et la distribution de l’orge subventionné.

«C’est une année électorale, le gouvernement a donc tout intérêt à mettre en exergue les points positifs et maquiller les points négatifs, surtout qu’il est sous pression avec la montée progressive de la grogne sociale suite à la réforme des retraites, la décompensation, la grève dans plusieurs secteurs», souligne Mohamed Amrani, professeur universitaire.

En pareille période, le gouvernement devrait décréter des mesures d’urgence au profit des agriculteurs, surtout les plus vulnérables. Les régions concernées sont celles du Haouz-Tensift, des plateaux phosphatés, de l’Oriental et du sud d’Oum Errabii. Dans ces zones, le déficit pluviométrique est estimé à 60% en comparaison à une saison normale, et le couvert végétal y est pratiquement nul. Mais c’est une décision politique qui ne relève pas uniquement du ministère de l’Agriculture. C’est le Chef de gouvernement qui doit la prendre, en concertation avec les départements concernés.

Toutefois, il faut souligner que l’Exécutif a décidé de réduire le taux des taxes douanières sur les importations de blé à 30% pour le début 2016. C’est la deuxième révision à la baisse du genre en trois mois seulement.

Sur le terrain, différents indices prédisent des jours difficiles pour le secteur agricole, même dans les périmètres irrigués. Au 10 janvier 2016, le niveau des réserves des barrages a atteint 9,63 milliards de m3, soit un taux de remplissage de 62% contre 73% au cours de la même période l’année dernière. Barrage Al Wahda, le plus grand ouvrage du Maroc avec une capacité de 3,7 milliards de m3, affiche un taux ne dépassant guère les 44%. Dans les périmètres irrigués, la situation demeure pour le moment satisfaisante, mais certains responsables des Offices de mise en valeur agricole (ORMVA) n’ont pas caché leurs inquiétudes.

«Dans le bassin versant d’Oum Errabii, il y a une bonne visibilité. Al Massira, principal barrage de la région, dispose d’un niveau de remplissage de 1,89 milliard de m3, soit un taux de 71,4%. 

Pour cette saison, les approvisionnements en eau devraient se faire normalement. Mais si la sécheresse persiste, notamment en deçà de 40% de remplissage, il faut une rationalisation, surtout que la région est connue pour des cultures grosses consommatrices d’eau, comme les betteraves, la luzerne ou autres», explique-t-on auprès de l’ORMVA des Doukkala, basé à El Jadida. Le même son de cloche est partagé à l’ORMVA de Tadla qui supervise un périmètre irrigué alimenté essentiellement par le barrage Bin El Ouidane présentant un stock en eau de 856 millions de m3, soit un taux de près de 70%.

Mais un autre détail risque d’impacter davantage les réserves en eau : il s’agit du niveau de chute des neiges jugé très faible qui alimente aussi bien les barrages que la nappe phréatique. 

Charaf Jaidani

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