La nature des matériaux de construction utilisés n’est pas la seule condition pour garantir la sécurité des édifices.
Les résultats de l’étude du CNRST seront déterminants pour catégoriser le risque sismique.
Par Charaf Jaidani
Le séisme d’Al Haouz a mis sur le devant de la scène les normes de sécurité dans les constructions. Il ressort des rapports établis par les différentes commissions techniques créées à cet effet que les dégâts ont été relevés essentiellement dans le monde rural. Il s’est avéré que les bâtiments sont conçus selon des techniques locales traditionnelles et dont l’ossature utilise en particulier la terre, la paille, le bois, le palmier, les roseaux ou des matériaux similaires. Dans ce cas de figure, faut-il imputer les dégâts aux seuls matériaux de construction locaux et privilégier le béton armé pour assurer la sécurité des édifices ?
Selon de nombreux professionnels issus de plusieurs corps de métiers qui ont un lien avec le BTP, «la nature des matériaux de construction utilisés n’est pas la seule condition pour garantir la sécurité des édifices». Le règlement parasismique des constructions stipule dans son article 3 qu’il est interdit de construire des bâtiments en terre sur des sols mous, expansifs, marécageux, inondables, à risque de glissement de terrain, en présence de nappe phréatique superficielle ou à moins de deux kilomètres de distance de failles géologiques actives connues.
«Il faut tout d’abord actualiser la carte sismique du Maroc. Les régions sinistrées ont été auparavant considérées comme à risque modéré, ce qui n’est pas le cas actuellement. C’est un travail de longue haleine qui doit être mené par les spécialistes de toutes sortes notamment les géologues. Il devra prendre des mois voire des années pour bien identifier les zones les plus risquées», a souligné Chakib Benabdellah, président du Conseil national de l’ordre des architectes (CNOA).
Il faut rappeler qu’au lendemain de la catastrophe, le Centre national de la recherche scientifique et technique (CNRST) a déployé une équipe pour faire un diagnostic précis de la situation. «Les résultats de l’étude du CNRST seront déterminants pour catégoriser le risque sismique. Quand ce risque est élevé, les constructions seront interdites ou devront obéir à des critères bien précis notamment le strict respect des normes parasismiques», a poursuivi Benabdellah.
Il faut rappeler que depuis le séisme d’Agadir en 1960, le Maroc s’est doté d’un arsenal juridique dédié. Cet arsenal a été renforcé dans le cadre du règlement de construction parasismique dit (RPS 2000) approuvé par le décret n°2-02-177 (22 février 2002). Un texte révisé en 2013 avec l’introduction de nouvelles dispositions à caractère technique qui responsabilisent tous les intervenants dans l’acte de bâtir.
«Ce texte de loi s’applique à tout le territoire national et à toutes les constructions sauf celles dites traditionnelles. Faut-il dans ces conditions revoir la législation en vigueur ? Pour assurer la sécurité de la population, il faut des normes de sécurité dans les constructions. Qu’ils soient de type local ou à base de béton armé, les matériaux utilisés doivent répondre aux exigences parasismiques», a insisté Benabdellah. Il a donné comme exemple de nombreux monuments historiques construits en produits locaux, qui ont résisté à l’usure du temps et à de nombreux séismes. Il s’agit des minarets de la Tour Hassan à Rabat et de la Koutoubia à Marrakech. Les deux édifices ont été construits au 12ème siècle par les Almohades. Ils ont une base en pierre enveloppée par un corps en terre compactée.
Mais le poids de l’informel dans les constructions à usage domestique perturbe l’application des normes parasismiques. Dans le monde rural, pour des raisons de coût, on ne fait pas appel aux architectes, bureaux d’études ou autres professionnels de la construction pour lancer un projet. Il est donc nécessaire que l’Etat mette en place une procédure plus simple et moins onéreuse pour réduire les charges liées au dossier du projet.