Protection sociale : le CESE alerte sur les graves menaces

Protection sociale : le CESE alerte sur les graves menaces

 

Les défis inhérents au financement, à l’extension et à la généralisation pèsent sur la pérennité des systèmes de protection sociale universelle des pays du continent. Le CESE s’est employé à initier le débat avec ses homologues étrangers à Rabat.

 

La pérennité de la protection sociale constitue un enjeu majeur aussi bien pour les pays développés que ceux en passe de le devenir. Si la pensée néolibérale considérait jusque-là les dépenses inhérentes à la protection comme un poste improductif, aujourd’hui tout le monde s’accorde à dire que la pérennité d’une croissance inclusive est étroitement liée aux efforts consentis en matière de protection sociale. Conscient du caractère crucial du sujet pour l’émergence du Maroc et des pays africains, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a organisé récemment une rencontre internationale portant sur le socle de la protection sociale universelle.

Cette manifestation, ponctuée par trois panels ayant trait aux défis de la gouvernance et ceux du financement et de la généralisation, a été rehaussée par la présence de Mohamed Yatim, ministre de l’Emploi et de l’Insertion professionnelle, et plusieurs membres des Conseils économiques et sociaux de pays africains et européens, notamment la France. Cela dit, le panel qui a sans doute suscité davantage l’intérêt des multiples participants, a été celui qui a porté sur les défis du financement du socle de la protection sociale universelle.

 

Un challenge commun 

 

A en croire Abdelaziz Adnane, membre du CESE et Directeur général de la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS), en dépit du périmètre variable et évolutif de la protection sociale selon les pays, celle-ci se heurte à plusieurs contraintes d’ordre financier, notamment en Afrique. Ce qui limite la portée, ralentit la dynamique d’extension et hypothèque l’avenir du système.

Cela dit, les progrès réalisés au Maroc en matière d’extension de la protection sociale sont confortés, entre autres, par l’Assurance maladie obligatoire (AMO) et le Régime d’assistance médicale (Ramed). Autres chiffres édifiants rappelés lors des échanges, 54% du Budget général de l’Etat (BGE) sont consacrés aux dépenses à caractère social. Toutefois, sont pointées du doigt la forte centralisation budgétaire au niveau du pouvoir central ainsi que la capacité des ordonnateurs pour l’exécution du BGE qui demeure insuffisante, eu égard aux défis de développement du pays. Toujours au registre des efforts, il y a lieu de souligner les multiples dépenses fiscales en la matière.

En dépit des avancées notoires, le système de protection sociale au Maroc, similaire à certains égards à ceux de certains pays du continent, pâtirait de l’existence d’une multitude de programmes juxtaposés, gérés de façon verticale. Ce qui pose le problème de cohérence et de cohésion d’ensemble, avec des implications négatives sur la pérennité du financement. «Il est crucial d’avoir une vision intégrée afin de mobiliser de façon efficiente les financements disponibles», suggère le patron de la CNOPS.

 

Absence de données exhaustives

 

Si la question du financement se pose avec acuité dans la plupart des pays du continent selon Yacouba Katilé, vice-président du Conseil économique, social et culturel du Mali, certains experts ont attiré l’attention sur les problèmes induits par l’absence de données exhaustives inhérentes aux dépenses des systèmes de protection sociale et leurs effets de redistribution sur les ménages. D’où la nécessité de bâtir des comptes nationaux de la protection sociale au Maroc, ce qui est de nature à faciliter l’appréhension de toutes les ressources et les dépenses. L’autre point qui a suscité des échanges fructueux, a été la question de la solidarité qui serait étriquée, notamment dans le système de protection sociale nationale.

«Le panier de soins n’est pas identique pour toutes les catégories socioprofessionnelles au Maroc. Quand bien même celui-ci est le même, les niveaux de couverture diffèrent. L’exemple édifiant est la différence existante entre la CNOPS et la CNSS», déplore Abdelaziz Adnane. Les niveaux de cotisation plafonnés pour les fonctionnaires constitueraient de surcroît un coup dur porté à la solidarité. ■

 

M. Diao

 


Diversifier les ressources financières

Plusieurs intervenants ont admis l’impératif de diversifier les ressources financières des systèmes de protection sociale universelle afin d’assurer leur pérennité. Généralement, les régimes à l’échelle du continent à l’instar du Maroc sont basés sur les cotisations sociales et l’impôt. Il existe peu de taxes par exemple liées aux comportements à risque, destinées au financement des régimes. Cela dit, la cherté de certains médicaments pour le traitement des maladies chroniques (cancer, diabète, etc.) et les prix prohibitifs des appareils médicaux accentuent le problème du financement des systèmes de protection sociale. D’où l’intérêt de mener une réflexion approfondie sur la gouvernance mondiale des médicaments.

 

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