Pourquoi le Maroc doit doubler ses ressources en eau d’ici 2030

Pourquoi le Maroc doit doubler ses ressources en eau d’ici 2030

 

- En l’absence de moyens pour renforcer la gestion rationnelle en eau, le pays sera confronté au stress hydrique.

- L’Etat prépare un vaste programme impliquant tous les acteurs concernés.

 

 

Le Maroc est un pays semi-aride soumis aux aléas climatiques et notamment la sécheresse. A ce titre, plusieurs régions du pays sont aujourd’hui menacées de pénurie en eau.

Et certains chiffres montrent que l’éventualité d’un stress hydrique n’est pas une vue de l’esprit : au début des années 90, le volume d’eau disponible par habitant était de 1.200 m3 par an. A partir des années 2000, il est passé à 950 m3 et en 2010, il n’était plus qu’à 800 m3 par an et par habitant. Au-delà de 2020, le niveau passera à 632 m3 et en 2030, il devrait chuter à 500 m3. Le Maroc devra répondre aux besoins galopants de l’urbanisation, de l’agriculture, du tourisme et de l’industrie, soit autant de secteurs pour lesquels des stratégies sectorielles ambitieuses sont lancées.

Pour faire face à cette hypothèse inquiétante, l’Etat s’est attelé à mettre en oeuvre un nouveau plan pour la période 2020-2050, dont l’élaboration a déjà atteint un stade avancé et sera lancé dans deux ans, le temps que les différents intervenants actualisent les projections et les rendent en adéquation avec la stratégie du gouvernement dans le domaine. Pour ce faire, un ensemble de textes juridiques a été mis en place notamment le décret 2.18.339. Cette loi supervise aussi bien le Plan national de l’eau (PNE), que le plan d’orientation de l’aménagement intégré des ressources hydriques et du plan de gestion des eaux.

 

Moderniser le réseau de distribution

 

«Les besoins en eau pour les usages domestiques ou l’agriculture sont en nette croissance. Le Plan national de l’eau veut assurer l’équilibre entre l’offre et la demande. Cet équilibre se fera non seulement à travers une mobilisation accrue des ressources en eau mais aussi à travers leur gestion rationnelle», souligne Charafat Afilal, secrétaire d’Etat chargée de l’Eau.

En effet, la stratégie veut mettre l’accent sur la gestion efficace de l’eau à travers l’augmentation de la rentabilité des réseaux de distribution pour atteindre un taux de 80% à l’horizon 2025. Plus de 120 millions de m3 d’eau par an seront économisés d’ici cette date. Il faut savoir en effet que les fuites d’eau et l’évaporation sont les principales causes de gaspillage de cette denrée naturelle. Le taux de rentabilité devrait passer à 90% à l’horizon 2030.

«Il est prévu de moderniser les réseaux de distribution et de maintenance. La réhabilitation des réseaux d’assainissement sera l’une des grandes priorités pour le PNE. En matière de mobilisation et de stockage des eaux, des investissements importants seront mobilisés pour la construction de nouveaux barrages», précise Afilal.

Il faut rappeler que la pénurie en eau a frappé de plein fouet certaines régions, ayant entraîné parfois des manifestations des habitants, notamment dans les régions sahariennes comme Zagoura, Tan Tan et Guelmim.

 

Plus de barrages

 

La politique des barrages sera également renforcée. Le département de tutelle prévoit la réalisation de 35 nouveaux ouvrages qui vont s’ajouter aux 140 déjà existants. 14 sont déjà en construction et une dizaine à l’étude. L’objectif à terme est d’atteindre une capacité de stockage de 20 milliards de m3 d’ici 2030 contre 16 milliards actuellement. En 2050, les prévisions tablent sur 25 milliards de m3.

Pour la préservation des ressources hydriques, les barrages doivent être accompagnés par des opérations de reboisement afin de lutter contre le phénomène d’envasement qui engendre la perte de plus de 75 millions de m3 d’eau annuellement. Cet envasement impacte par ailleurs la durée de vie des barrages et génère des coûts d’entretien importants.

Par ailleurs, il faut noter que le Maroc nourrit de fortes ambitions en agriculture à travers le Plan Maroc Vert (PMV). Ce secteur absorbe 80% des ressources hydriques et ses besoins en eau devraient augmenter sensiblement dans les années à venir pour répondre aux objectifs de la stratégie sectorielle. Dans le cadre de la modernisation de l’agriculture, le PMV veut développer l’irrigation localisée à grande échelle par le biais de reconversion des techniques d’irrigation existantes et à efficience limitée, par le gravitaire notamment. L’objectif fixé est d’équiper en irrigation localisée près de 50% de la superficie totale aménagée au niveau national. Au programme figure une conversion massive de l’irrigation de surface et par aspersion à l’irrigation localisée, sur une superficie de près de 550.000 ha pendant une période de 10 ans; soit un rythme d’équipement moyen de près de 55.000 ha/an. ■

 


Quid de l’autoroute de l’eau ?

C’est un méga projet qui est toujours à l’étude. Il devrait permettre de transférer près de 850 millions de m3 du nord pluvieux et humide, vers le sud quasi sec.

Une fois réalisé, ce grand chantier devrait remédier aux inégalités hydriques régionales et donner une forte impulsion au secteur agricole surtout dans les régions du Souss, R’hamna, Abda, Hmar et Chichaoua.

Techniquement, le projet consiste en la construction d’un vaste ensemble de canaux artificiels (pas moins de 500 km). L’eau sera notamment transférée des bassins des oueds Laou, Loukkos et Sebou excédentaires, vers ceux déficitaires de l’Oum Er Rbia, Tensift et d’Oued Souss.


 

 

Par C. Jaidani

 

 

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